Big Ed SULLIVAN
<"James Café">
[Date de rédaction: Dimanche 06 Octobre 2002]
Interview de Big Ed SULLIVAN. (3 octobre 2002)Qui est Big ed Sullivan ?Je suis New-Yorkais, j’ai 45 ans et je joue le blues depuis une vingtaine d’années.
Je suis actuellement en tournée et c’est la troisième semaine sur une tournée de cinq semaines, réparties sur la France et la Belgique. Ca se passe très bien.
Quand a commencé cette tournée ?Le 12 septembre.
Vous êtes guitariste, mais jouez-vous d’un autre instrument ?Je joue de la guitare, de la lapsteel, de l’harmonica, et un peu de claviers.
et vous préférez la guitare ?Oui, la guitare et le slide.
Pourquoi avoir choisi la guitare ?Pour les filles
[rires].
C’est plus facile ?Beaucoup plus facile.
[rires] J’aime la guitare. J’ai toujours aimé la guitare.
Comment définiriez-vous votre musique ?C’est principalement du blues, du rockabilly, du rock, et du boogie. J’écris la plupart de mes chansons, ce sont des compositions.
Vous pensez que c’est important de mixer ces styles ?Oui, le blues est le début de tout ça. Le rock, le rockabilly, émanent du blues. De même que le funk, le rythm and blues. Donc je joue 90% de blues et le reste est un peu de rockabilly et de rock.
Qu’est-ce qui vous attire dans le blues ?J’aime cette musique. C’est celle que je préfère car elle est très expressive, chargée d’émotions, puissante, avec beaucoup de feeling. Bien plus que beaucoup d’autres musiques.
C’est de la vraie musique.
Vous pensez être un bluesman ou un joueur de blues ?Assurément un bluesman. Je ne suis pas riche alors que j’ai fait environ 3000 concerts, donc je suis un bluesman [rires].
Y a-t-il une différence entre bluesman et joueur de blues ?Oh oui, absolument. Quand je joue...je ressens ce que je joue. Quand j’écris, je ressens ce que j’écris.
Qu’est-ce qui fait que vous êtes différent ?Le feeling. Beaucoup de gens, lorsqu’ils apprennent à jouer de la guitare, n’apprennent qu’à jouer des "licks", mais peu apprennent à jouer le blues. Beaucoup de personnes jouent du blues mais ne sont pas des bluesmen.
On vous voit souvent jouer en slide. Pensez-vous que ce soit important pour le blues ?Le slide, c’est un style. Je ne pense pas que ce soit important pour le blues. Vous pouvez être un très bon guitariste de blues sans pour autant jouer de slide. Albert Collins, Albert King, B. B. King, Otis Rush, Buddy Guy, beaucoup de guitaristes ne jouent pas de slide. Mais j’aime le slide. La plupart du temps, en concert, je joue en slide car, pour attirer l’attention du public, le slide est très important, c’est très expressif. Mais il faut que ce soit bien joué parce que vous jouez plusieurs notes et pas seulement une note entre deux autres. Comme lorsqu’on joue un "bend". et ça, c’est très expressif.
Vous jouez du NYC blues. Quelles sont ses caractéristiques ?D’après Popa Chubby, ce blues est plus dur. C’est du vrai blues, mais en un peu plus dur.
Parce que New-York est un ville rude, et ça se reflète dans son blues. Comme pour le "vrai" blues, nous avons un scène blues non négligeable qui est très forte.
Il y a beaucoup de très très bons musiciens, et en particulier des guitaristes. Vous pouvez le constater dans les albums "Popa Chubby presents the NYC blues" 1 et 2. Ces guitaristes sont très bons.
Ce style NYC blues est assez récent. Quelle est son histoire ?New-York n’a pas une histoire du blues aussi longue que celle de Chicago, ou de la Côte Ouest, du Texas, de la Louisiane. Mais il y a de très bons guitaristes, venus du funk ou du rythm and blues, et c’est ce qui fait aujourd’hui la force de cette scène blues.
Selon vous, comment ce blues va évoluer ?Popa Chubby nous motive à diffuser ce style à travers le monde, et c’est ce que nous faisons.
et si cette scène blues s’exporte correctement, elle pourrait avoir une influence sur le style d’autres pays.
Ce blues pourrait-il évoluer vers une musique plus électronique ?Non.
Popa Chubby a produit vos deux albums. Quelles sont vos relations avec Popa Chubby ?C’est un bon ami et un ami de longue date. Je me rappelle que nous avions l’habitude de faire des concerts dans une petite ville, il y a pas mal d’années. Il vendait alors une cassette audio dont la jaquette était manuscrite. C’était son premier enregistrement. Récemment, je lui ai donné ce premier album qu’il avait fait sur cassette. Je l’avais retrouvé dans ma maison, et il n’en avait aucun exemplaire.
Nous avons de bonnes relations, il est un bon producteur, il nous aide beaucoup à New-York et fait de bonnes choses, même en France.
Comment est le public européen ?Le public américain et français est un très bon public. Je pense que le public français est nombreux et qu’il nous apprécie un peu plus parce qu’il n’a pas souvent l’occasion de nous voir.
Bien que je sois populaire en Amérique, à New-York, peu de gens viennent me voir. Mais en France, beaucoup de gens viennent me voir. Il y a 6 mois, je n’aurais pas pensé qu’autant de gens viendraient. C’est un public vraiment sympa.
Et en Belgique, au Royaume-Uni ?Je ne joue pas en Angleterre.
Et aux Pay-Bas ?Non, pas encore. Mon album est ditribué en France et c’est ma troisième tournée. Mais peut-être lors d’une prochaine tournée, j’irai aux Pay-Bas. J’essaierai de m’étendre de plus en plus.

Big Ed SULLIVAN était, ce jeudi 3 octobre 2002, en concert exclusif pour la région lyonnaise au James Café de Toussieu. Ce café-restaurant nous offrait ce soir-là une des personnalités du NYC blues actuel.
Lancé pour deux heures ininterrompues de concert, Big Ed a, dès les premières minutes, annoncé la couleur. Guitare puissante, incisive, solos de guitare endiablés, et slide sauvage. Parce que la marque de fabrique (du son) de Big Ed, c’est le slide. Et il slide avec tout et n’importe quoi. Il faut faire attention à ce qui traîne sur les tables.
Souffrant de la chaleur des projecteurs, il a d’abord utilisé une serviette éponge, puis en allant dans la salle, il joua avec un paquet de cigarettes, une carte de menu, un verre, un photophore. Ces extravagances furent l’occasion de réaliser de longs solos de guitare, forcément extraordinaires, et dans ces conditions le public fut vite conquis. Il laissa même sa guitare au guitariste de Diesel Dust assis dans la salle, et ce dernier nous a gratifié d’un solo très honorable.
Le show fut à la hauteur du bonhomme, et l’ambiance (que je n’avais personnellement jamais vue aussi survoltée au James Café) fut au rendez-vous.
Reprenant pour la plupart des titres de ces albums, comme "Stranded In Vegas", "Run The Border", ou encore "I like The Night" qui fut particulièrement entraînant. Les accompagnateurs de Big Ed, le bassiste Francis CAMPELLO et le batteur Jean-Michel RIGER furent très bons eux aussi. D’un haut niveau musical, ils étaient également imperturbables pendant les longues promenades de Big Ed entre les tables du James.
Francis, au chœur pour certaines chansons, a été remarquable.
Musicalement, le jeu de Big Ed, à cause de ses élucubrations scéniques, est certes un peu brouillon. Parfois le son n’est pas forcément agréable à l’oreille, et ce quelque soit la marque de bière gravée sur le verre... Mais il faut reconnaître qu’en tant que guitariste, lorsqu’il joue plus qu’il ne fait le show, il assure.
Sa Télécaster customisée, il l’a connaît par cœur, il fait ce qu’il veut avec, et le prouve sans relâche. De plus, le blues est bien présent. Plus que je ne l’aurais supposé au premier abord. Un blues proche du rock, dur, comme il me l’avait décrit lors de l’interview qu’il m’a accordée. Cependant un blues mieux inspiré que celui de Popa Chubby (fer de lance à la mode du NYC blues), avec un feeling plus important, une inspiration plus évidente. Même s’il n’a pas brillé dans un titre tel que "Thrill Is Gone", il a fait mouche sur des blues-rocks énergiques et même les boogies qui furent très dynamiques.
Cette soirée fut un grand plaisir pour le public qui était réellement transporté par la musique et la présence scénique de Big Ed.
Pour le rappel, un harmoniciste de la salle fut invité, ajoutant encore à ce côté blues qui est notre sujet de prédilection et fut bien représenté ce soir-là.
Article paru dans
La Gazette de Greenwood No 47.
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© Philippe ESPEIL
- Dernière modification: Lundi 21 Octobre 2002