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Jeff Toto Blues, Blues De Picolat, Colin John


au festival de Salaise/Sanne



[Date de rédaction: Dimanche 14 Avril 2002]


Chaque année, au mois d’avril, Salaise sur Sanne (38) nous propose un festival de blues qui, par la qualité de sa programmation, est devenu un événement blues important en début de printemps.

Jeff Toto Blues
Cette année, le groupe Français ouvrant la soirée du 5 avril nous venait de Lozère. Le groupe Jeff Toto Blues, très actif dans sa région d’origine, a été nominé au Tremplin Blues/Seine 2001 et affirme de plus en plus sa volonté de se produire ailleurs qu’en leurs terres conquises.
Cette soirée fut pour eux l’occasion de faire un excellent concert devant un public qui, pour la plupart je pense, les découvrait.
Emmené par un Jean-François Thomas débordant d’enthousiasme, la salle n’a pas mis trop longtemps à chauffer. Dès le premier titre, Jeff a fait participer le public (ce qui est peut-être un peu tôt) et rapidement la salle conquise au fil des morceaux a tapé des mains et chanté.
La musique de Jeff Toto a l’esprit ouvert et intègre aussi bien le reggae, la soul ("Tu Me Soûles Man"), que le blues, ce qui a l’avantage de toucher un public large.
Le bassiste Eric Orsoni et le batteur Didier Hanot étaient accompagnés ce soir-là par Stéphane Espinasse, harmoniciste trop souvent absent de cette formation.
Sans être d’exceptionnels musiciens, j’ai trouvé le bassiste plein de feeling, surtout sur le reggae "Le Blues Jamais Blasé" ; son expérience avec Bernard Lavilliers y est peut-être pour quelque chose.
L’harmoniciste, présent seulement sur quelques titres, n’a pas eu l’occasion de se mettre suffisamment en valeur à mon goût.
Hormis le fait que Jean-François, loin d’être manchot sur sa Télécaster bleue électrique, nous ait gratifié entre autre d’un magnifique solo, il chante aussi de sa voix gravillonneuse et pleine d’accent du Sud des textes intéressants, relatant la réalité sociale de tous les jours ("N’y Va Pas Franky"), les peines de cœurs habituelles aux blues, les tensions du couples traitées avec humour ("Le Blues de l’Escalier").
Cette pluralité et la capacité à installer une bonne ambiance entre la scène et le public est ce qui fait tout l’intérêt de ce groupe sympathique, et nous a permis de débuter cette première nuit de festival sur une très bonne note.
Blues De Picolat
Le groupe suivant suscitait plus ma curiosité. En effet Blues De Picolat, est un ensemble connu pour chanter le blues en catalan. De plus, j’en avais entendu de plutôt bonnes critiques, notamment à l’écoute de leur premier album.
Tout d’abord, la scène est finalement occupée par beaucoup de monde puisqu’ils ne sont pas moins de sept à jouer. En plus du guitariste-chanteur, de la batterie, du bassiste, et du clavier, un sax vient prêter main forte ainsi que deux chœurs. Beaucoup de monde disais-je et c’est justement l’aspect qui me gêne souvent dans ce genre de composition où les musiciens ont du mal à se placer. A mon humble avis, chacun d’entre eux n’étaient pas mauvais du tout, bien au contraire, mais un certain manque de cohésion a fait que leur prestation ne m’a pas emballé.
Le set ayant commencé par "Tramuntana", les suivant furent soit en catalan pour leur propres compositions, soit en anglais pour les reprises. Ne comprenant pas un mot de catalan, je ne saurai donner un avis sur les textes.
Le chant, bien que porté par un bon jeu de guitare un peu blues, parfois un peu jazzy, m’a semblé monotone parce que trop monocorde et du coup peu accrocheuse.
Le mixage laissait à désirer, excluant quasi totalement la claviériste.
Bref, plusieurs points regrettables qui n’ont pas permis à Blues De Picolat de me séduire.
Je pense que ce mauvais soir est à ranger aux oubliettes et j’espère les revoir dans de meilleures conditions.

Colin John
La tête d’affiche de ce vendredi était Colin John. Américain ayant roulé sa bosse avec une brochette de musiciens de rêve : Albert Collins qui le "découvre" en 1987, Phil Guy, Willie Dixon, Pinetop Perkins, BB King.
A la vue de ces personnalités, on pourrait alors s’attendre à un concert de blues à la croisée du Texas et de Chicago. Et bien non. Colin John, nous a donnait une représentation consacrée au blues-rock, voire rock. Son jeu est très maîtrisé, dévoilant une palette de techniques parfaitement bien intégrées. Souvent trop démonstratif à mon goût, notamment dans ses envolées hendrixiennes à la limite de la lassitude, il a cependant su apporter quelque chose de neuf à une musique de style SRV déjà maintes fois copiées et recopiées. Alternant des passages lents attirant l’attention du public, et des passages plus rageurs, pleins de puissance sonore, Colin John a su placer assez de nuances dans sa musique pour la rendre intéressante.
Un bémol toutefois à sa prestation ; s’il semble souvent inspiré dans ce qu’il fait, j’ai eu du mal à déceler lorsqu’il ne faisait qu’interpréter ces titres ou lorsqu’il était vraiment dedans sa musique et y mettait une certaine dose d’humanité.
Au chant, Colin John a fait ses preuves, modulant sa voix à souhait, n’hésitant pas à lui faire suivre la mélodie de la guitare. Dans ce genre, le morceau qui m’a le plus bluffé fut un blues lent (du moins au début et à la fin) joué au bottleneck avec un volume sonore d’abord très faible, et sur lequel Colin a posé sa voix aiguë, donnant l’illusion que le chant et la guitare ne faisait plus qu’un. Un moment superbe.
La rythmique était impeccable, assurée par un batteur qui s’est rendu plus que discret et un bassiste très expressif (Jeff Walker ?) et par moment amusant par ses mimiques.


Article paru dans La Gazette de Greenwood No 42.

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© Philippe ESPEIL Dans les emails, remplacez _A_ par @ - Dernière modification: Dimanche 05 Mai 2002