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Vitas, Pretty Things, John HENRY


à Salaise Sur Sanne



[Date de rédaction: Mardi 08 Avril 2003]


Vitas
La première soirée de ce festival du blues de Salaise Sur Sanne, débutait le 4 avril 2003 par le régional Vitas. Venant en voisin depuis la région grenobloise, Vitas est le guitariste (accompagné du bassiste) du groupe Ded Harpo, finaliste du Tremplin Blues Sur Seine en novembre 2002. Mais dans cette fomation en duo, le répertoire change carrément, et correspond beaucoup plus à la personnalité de son leader Vitas.
Habillés tous les deux de grandes salopettes oranges rapiécées de macarons criards, leur tenue vestimentaire laisse tout de suite penser à deux gais lurons.
La musique correspond également à cette image. Plaquée sur la musique blues, les testes en français et la façon dont ils sont interprétés ne sont prétexte à la dérision. Vitas nous a donc joué de ses guitares, "Solange la guitare orange" et "Ignace le dobro de l’espace" en variant les sons, les attitudes, et plaisantant facilement.
Ces deux compères, complètement déjantés, nous emmènent dans un délire décapant, et très "borderline" pour les amateurs de blues.
Mais la bonne humeur est là. Passer un bon moment et distraire le public est certainement leur leitmotiv.
Le rappel s’est soldé par un étonnant "Pirouette Cacahuète"...

The Pretty Things
Il faut le reconnaître, la grande majorité du public était venue pour assister au concert des Pretty Things.
Ces personnes ont été comblées puisque le groupe a demandé à passer en deuxième partie, reléguant John HENRY en fin de soirée.
Les Pretty Things, groupe de rock britannique des années 60-70, se présentait dans son line-up originel, emmené par le chanteur Phil May et le guitariste Dick Taylor.
Leur musique reste dynamique et bien dans l’esprit rock’n roll de l’époque mais je dois avouer que ce style n’est pas ma tasse de thé. Je ne porterai donc aucun jugement sur leur prestation.

John HENRY
Après le rock british des Pretty Things, la tâche s’annonçait dure pour John HENRY. Outsider de la programmation de cette soirée, John HENRY n’était effectivement pas connu des personnes de mon entourage. Encore très jeune, il étonne dès les premières notes et les premières phrases chantées. Bourré de feeling, il joue un blues
très influencé par Robert CRAY. Entendre ce son, clair et précis, posé John HENRY sur un jeu pas trop bavard, m’a en effet rappelé les premiers albums de CRAY. Sans doute que son gabarit et son visage un peu poupon ne font que confirmer cette ressemblance. La voix elle aussi est un appel à ces souvenirs. Un peu soul, cette belle voix sait se faire grave et roulante, voire se transformer en falsetto. A l’aide de quelques standards dont "Right Next Door" et "Strut" de Taj MAHAL, John HENRY nous donne un aperçu de ses autres influences : BB KING, Buddy GUY.
La voix et le swing de Robert CRAY, des mimiques et une gestuelle à la BB KING, un chant s’inspirant parfois de Buddy GUY. Quel programme !
La présence scénique du bonhomme a séduit le public. Tous acquis à sa cause, nous avons partagé un formidable moment avec ce guitariste talentueux. Certes, il est jeune et imite encore trop ses mentors. Il a besoin d’affirmer sa personnalité mais le show est déjà bien établi et ce musicien a assurément de l’avenir.
Pour appuyer ce jeune homme, l’italien Lele ZAMPERINI à la batterie, et le bassiste noir du New Jersey, Barry ROBINSON, discret, est resté trop en retrait à mon goût. Par contre, le claviériste Pietro TAUCHER, italien également et leader d'un autre groupe appelé Blues Boy Rules, s’est montré très démonstratif. Doué d’une grande dextérité, il s’est éclaté dans des soli parfois répétitifs mais toujours très spectaculaires.
De retour pour le rappel, John HENRY, nous a donné une version de "Hey Joe" qui m’a attaqué par un frisson dès l’intro. Pour une reprise de Jimi HENDRIX, exercice courant mais risqué, celle-ci fut réussie, à l'image de son concert qui fut pour moi une formidable découverte. Retenez son nom, je pense qu'on en entendra à nouveau parler !

[Date de rédaction: Mercredi 18 Juin 2003]



Interview de John HENRY. (11 juin 2003)
Bonjour John, Pouvez-vous vous présenter pour les visiteurs de l'Agenda Du Blues ?
Mon vrai nom est John Henry Mc MULLEN III. Je suis né le 4 septembre 1968 à Tuskegee, en Alabama. A cette époque, mes parents étaient étudiants au Tuskegee Institute. Mon père, originaire de Pennsylvanie, était venu à Tuskegee pour entrer dans le Mouvement Pour Les Droits Civils que le Dr Martin Luther KING Jr dirigeait. Il a alors participé à la célèbre marche de Selma à Montgomery.

Pourquoi avez-vous choisi de vivre en Italie ?
En 1994, j'étais soldat en Italie, en tant que fantassin. Quand j'ai terminé mon service militaire, j'aimais beaucoup le mode de vie des Européens et j'ai décidé de rester plus longtemps.

Vous avez toujours été musicien ?
J'ai commencé par jouer de la batterie quand j'avais onze ans. Je n'ai attrapé une guitare que vers l'âge de seize ans. La musique a toujours pris une grande place dans ma vie mais j'étais persuadé que je suivrai un autre chemin dans la vie. Finalement, j'ai toujours été musicien et impliqué dans le milieu de la musique.
John HENRY

Je vous ai entendu au festival de Salaise/Sanne, cette année, et vous semblez très influencé par Robert CRAY. Quelles sont vos influences musicales ?
Robert CRAY est assurément une influence. Bien que je ne joue qu'une de ses chansons, on m'a dit, et je suis d'accord sur ce fait, que mon style est similaire au sien. Mes influences sont multiples et variées. D'un point de vu stylistique, mes influences vont du gospel au jazz, en passant par le blues, avec toutes leurs variantes.

Quand et comment êtes-vous tombé amoureux du blues, avez-vous toujours joué du blues ?
J'ai tout le temps écouté du blues mais, avant, je n'y pensais pas beaucoup parce que c'était simplement la musique que mes parents et mes grands-parents écoutaient. En d'autres mots, je n'ai su que plus tard ce qu'était le blues. Avant, c'était juste de la musique.
C'est lorsque j'ai commencé à jouer de la guitare que j'ai compris la différence.
Avec la guitare, j'ai appris à écouter la musique différemment et ça m'a permis de mieux apprécier le blues.

Votre prestation à Salaise était votre premier concert en France ?
Oui et j'aimerais vraiment remercier les organisateurs, Nelly CHANAUX de Travail Et Culture et Alain MICHEL de P-Box Concerts. Ils ont fait un boulot fantastique !

Vos prochains concerts en France auront lieu au Creusot (le 27 juin) puis à Omblèze (le 11 juillet au Moulin De La Pipe(26) ). Est-ce que vous attendez quelque chose de particulier de ces concerts ?
Si Dieu le veut, un peu plus que le précédent concert !

En 2002, vous avez sorti "Here I Am", est-ce votre premier album ?
Oui. J'ai beaucoup appris avec cet album et je travaille au prochain.

Andy J. FOREST est très apprécié en France et il a joué sur cet album.
Comment l'avez-vous rencontré et comment s'est passé cette collaboration ?

Andy, quel gars talentueux ! Il sait chanter, jouer de l'harmonica et de la guitare, peindre, écrire des nouvelles.
Je ne me rappelle pas précisément comment nous nous sommes rencontrés. Il est de ces personnes que vous rencontrez et avec lesquelles vous vous sentez comme si vous les aviez toujours connues.
Il est d'une grande sincérité, il ne triche pas.
Quand j'enregistrais mon album, j'ai appris qu'Andy tournait en Italie. Je l'ai appelé et lui ai demandé si ça lui disait de jouer sur quelques morceaux. Ce soir-là, il avait un concert dans le sud de l'Italie et il a pris le train après le concert pour enregistrer avec moi le lendemain. Il ne pouvait rester avec moi seulement que quelques heures parce qu'il avait un autre concert en Suisse ou ailleurs. Malheureusement, par manque de sommeil, il n'a pas pris le bon train à Bologne et est parti vers la France (Je crois qu'il aime bien la France). Il a pu s’arranger et est quand même venu au studio ; nous n’avions qu’une heure environ avant qu’il ne prenne le train suivant. Il était complètement crevé ! Il n’avait pas dormi la nuit précédente, il avait cinq heures de décalage horaire, les yeux rougis, et la seule chose qui le tenait éveillé étaient les cafés italiens qu’il descendait.
Malgré ça, il a fait de très chouettes parties d’harmonica.
Here I Am
C’est ce que je veux dire lorsque je dis qu’il est très sincère et n’est pas prétentieux. Il aurait très bien pu me dire qu’il ne pouvait pas le faire. Il aurait eu de bonnes raisons. Au lieu de cela, il a fait un détour pour venir m’aider et jouer superbement, en dépit des difficultés.

Sur scène, je vous ai vu avec le pianiste Pietro TAUCHER (je crois qu’il a également son propre groupe). Comment cela se passe-t-il avec ce musicien et sera-t-il sur votre prochain album ?
Pietro est un grand organiste ; en fait, il a été élu un des meilleurs organistes d’Italie en 2002. Il est un des premiers musiciens que j’ai rencontré en Italie mais nous n’avons travaillé ensemble qu’à partir de l’année dernière.
J’aimerais beaucoup l’avoir sur mon prochain CD.
Il tourne aussi avec Sharrie WILLIAMS et peut-être qu’il enregistrera avec elle dans un futur proche.

Que pouvez-vous me dire sur Barry ROBINSON ? Je crois qu’il est un de vos amis depuis longtemps, n’est-ce pas ?
Oh oui, Barry et moi sommes de bons amis depuis à peu près huit ans. Il est de New Jersey et jouait de la basse alors que je n’étais pas encore né ! Il maîtrise vraiment tous les styles de musiques américaines. Que ce soit le gospel, le blues, la country, le rock... Quoique ce soit, si c’est de la musique américaine, il l’a déjà joué.
Dans ses jeunes années, Barry a fait deux tournées dans les camps militaires au Vietnam. Il m’a raconté une anecdote de cette période où il jouait de la basse au Vietnam. Quand il était là-bas, il ne pouvait se procurer de nouvelles cordes. En raison de la chaleur extrême et de l’humidité, il ne lui resta qu’une corde sur sa basse. Au lieu d’abandonner, il s’est empressé d’apprendre plusieurs hits de Motown et Stax sur une seule corde !

Vous avez joué dans plusieurs pays dans le monde. Selon vous, quelles sont les différentes façons dont on écoute le blues en Angleterre, aux USA, en France, en Italie ?
Je n’ai pas encore eu le plaisir de jouer en Angleterre. Pour les USA, la France, l’Italie, je pense que tout vient de la culture et d’un goût acquis pour la musique. Je pense que j’ai appris plus sur le blues et les variétés de ma propre culture en jouant en Europe qu’en jouant aux Etats-Unis.
Aux Etats-Unis, j’ai abordé beaucoup de choses sans me poser de questions simplement parce qu’il y avait une culture partagée entre les musiciens et le public. Je pense que beaucoup d’Américains sont coupables de ça avec le blues, ils le prennent tel quel. Ca fait tellement partie des piliers de leur culture.
A mon avis, les Européens, en étant hors de la culture américaine, sont plus en phase avec ces différences. Ils ont une référence à partir de laquelle ils acceptent ou rejètent la musique.
Ceci étant dit, la France a une super et solide histoire avec la bonne musique américaine, et en particulier le blues. Par sa continuelle attirance pour le blues, affirmée avec les années, la France a acquis un goût raffiné pour la musique, sans doute plus qu’en Italie.
Mais de toute façon , la musique est juste le rythme d’un peuple et la mélodie est son histoire.
Il n’y pas vraiment de différentes races ou nationalités, seulement des cultures différentes.
Mais qui suis-je pour parler ainsi, je n’ai joué en France qu’une fois ! :-)

Parmi les groupes qui me viennent à l’esprit et que l’on voit souvent en Italie, il y a Family Style, Egidio Juke INGALA, parfois Andy J. FOREST, il y a eu le regretté Cooper TERRY. Quelle est ton opinion sur la scène blues en Italie ?
L’Italie a une bonne poignée de passionnés de blues. L’infrastructure qui supporte ce milieu se construit lentement. Pour avoir une idée de ce qui se passe en Italie, jetez un œil sur www.bluesandblues.it.

Merci beaucoup pour avoir répondu à mes questions et à bientôt.

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© Philippe ESPEIL Dans les emails, remplacez _A_ par @ - Dernière modification: Vendredi 02 Mai 2003