Henry GRAY & The Cats, Lil'Ed & The Blues Imperials
à Vaulx En Velin
[Date de rédaction: Mardi 08 Avril 2003]

Le festival A Vaulx Jazz a eu lieu au
Centre Culturel Charlie CHAPLIN, à Vaulx en Velin, pour sa seizième année. La traditionnelle nuit du blues jouait dans la cour des grands puisqu’elle proposait à l’affiche Henry GRAY And The Cats (incluant Lil’ Buck SINEGAL) et Lil’ ED And The Blues Imperials.
Henry GRAY est un illustre personnage de notre planète blues. Pianiste de son état, il a joué avec les plus grands et fut aux côtés de Howlin’ WOLF pendant plusieurs années (de 1956 à 1968), 10 ans après une époque où, Henry originaire de la Louisiane, a suivi l’engouement pour le blues en allant vers Chicago. Son compagnon, Lil’ Buck SINEGAL, louisianais lui aussi, est moins connu, si ce n’est en tant que sideman, mais ne compte pas moins un palmarès étonnant.
Encore fringant pour son âge (78 ans), Henry GRAY ne joue pas vite, ne part pas dans des envolées de notes à n’en plus finir, mais à un rythme étonnant tout en jouant des basses très roulantes à la main gauche. Il est posé, encore très sûr de lui, et montre un charisme remarquable. Le public fut aisément entraîné par ce vétéran. On retrouve dans son jeu une certaine nonchalance trahissant sans aucun doute ses sources louisianaises. Parmi ses influences, le Chicago blues vit dans sa musique et nous rappelle qu’il a été le pianiste du Wolf (dont il a joué "Red Rooster") pendant plusieurs années et a accompagné Billy Boy ARNOLD et Muddy WATERS ou encore BB KING. Il est à l’aise dans des styles différents et nous l’a montré en interprétant du blues bien sûr mais

aussi du rock ,du boogie, et qui aurait pu s’attendre à ce qu’il reprenne "Blueberry Hill" ou "Let’s Do The Twist" ? On eut droit à "Sweet Home Chicago", mais pas à la fin du set ce qui constitue en soit une originalité

Sa diction est difficile à suivre tant il mâche ses mots. Quel accent ! Il a cependant fait l’unanimité auprès du public, jusqu’à attiser quelques dames collées devant la scène et en demandant toujours un peu plus.
Ce groupe de choc, The Cats, est composé également d’une rythmique tenue par Andy CORNETT à la basse et de Earl CHRISTOPHER à la batterie, et d’un harmoniciste en la personne de Brian ‘B.B.’ BRUCE.
L’harmoniciste montre un flegme déroutant. Malgré un visage stoïque et l’impression qu’il joue parallèlement au groupe et communique peu avec les autres membres, il bouge et ondule avec la musique ; c’est une vraie pile mais son jeu n’est pas aussi spectaculaire.
Andy CORNETT veille sur tout ce petit monde et, aidé par le gesticulant Earl CHRISTOPHER, apporte une assise rythmique confortable. Plutôt sérieux derrière sa basse, il se lâche parfois sur certains morceaux, notamment celui où il joue (moyennement), non pas de la basse, mais de l’harmonica avec BRUCE.
Lil’ Buck SINEGAL a réalisé un petit set seul, sans Henry GRAY, où il a pu se présenter moins discret et montrer de quoi il est capable. Une reprise de "The Thrill Is Gone", qu’il avait joué à la balance et m’avait scotché, m’a à nouveau frappé. Lil’ Buck SINEGAL est un bluesman très inspiré, égrainant des solos de toute beauté. Son jeu est tendu et sensible. Bien qu’il montre une décontraction notable dans son jeu, il est plein de feeling dès qu’il se jette sur quelques phrases de guitare.
Dès la fin du set, pas de rappel, mais aussitôt la descente de Henry GRAY dans les premiers rangs de la foule fut l’occasion de franches accolades avec des fans venus le féliciter.
Après le concert de Henry GRAY, c’est sûr, la soirée sera un bon souvenir. Et avec Lil’ Ed comme deuxième partie, la qualité de cette édition n’est plus à discuter, ce sera un bon cru.

Le groupe arrive et se met en place. Lil’ Ed n’est pas encore là, mais l’imposant James 'Pookie' YOUNG, son demi-frère, est présent, tenant la basse.
Le second guitariste de Lil’ ED, Mike WOLANCEVICH, débute le set avec "The Things That I Used To Do" après une longue introduction. Il est très bon guitariste, le toucher est fin, le jeu à l’aise, et sa voix passe vraiment bien. C’est également lui qui, dans le rôle de maître de cérémonie, présente Lil’ Ed WIILIAMS qui déboule depuis les coulisses en jouant une intro forcenée de son premier morceau.
A l’image de toutes les photos que j’ai pu voir de lui, le personnage est souriant, et joue de façon énergique. Monté sur ressorts, sautant, pirouettant, gesticulant, il enchaîne les titres et son groupe le suit allègrement.
Lil’ Ed aime communiquer avec son auditoire, ses mimiques plaisent et le public en redemande en l’encourageant. Les ficelles sont parfois grosses mais le public adore. Durant tout le concert, cet artiste nous aura prouvé que le Chicao blues, d’une certaine manière existe encore et est bien vivant, sous une forme très contemporaine. Directement inspiré de "slider" comme Hound Dog TAYLOR ou son oncle JB HUTTO, il a un jeu furieux et jouissif.
Tout le groupe est là pour s’amuser, tout en faisant tourner une mécanique pro et bien rodée, et il y a un petit grain de folie qui, au fil des titres, atteint un peu chaque musicien.
La fin de son set sera marqué par une courte descente de Lil’Ed dans les premiers rangs du public. Le concert se termine de façon un peu bruyante, on sent que les musiciens se sont bien défoulés et n’ont pas ménagés leurs efforts pour nous donner un show à la fois de haut niveau et explosif.
Cette soirée a été mémorable et a répondu à mes espérances. Cette affiche remarquable dénote une programmation du Centre Culturel Charlie CHAPLIN d’un haut niveau de qualité, et permet de classer assurément ces concerts parmi les grands moments blues de l’année 2003 dans la région lyonnaise.
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© Philippe ESPEIL
- Dernière modification: Dimanche 04 Mai 2003