Jean CHARTRON, Marvelous Pig Noise, Jeff Toto Blues
à La Première Nuit du Blues
de Saint-Flour-De-Mercoire
[Date de rédaction: Jeudi 09 Août 2001]
Oui, il y a du blues en Lozère! Et la première nuit du blues a eu lieu cette année, le 21 juillet, à St Flour de Mercoire, juste à côté de Langogne.
Le village est petit, certes (je ne suis même pas sûr qu'il y ait un bistrot) mais il y a tout de même un théatre, le Théatre de L'Arentelle. C'est à l'origine une ancienne grange en pierres, bien pittoresque, restaurée et aménagée en théatre avec Une salle de réception et une autre salle où se trouve la scène. Le tout est un habile assemblage de bois et de pierre.
Si cette soirée était la première nuit du blues, c'était aussi une première pour moi puisque je ne connaissais (si ce n'est de réputation) aucun des groupes à l'affiche, à savoir Jean CHARTRON, Marvellous Pig Noise, Jeff Toto Blues. Une idée originale était de proposer au public de se restaurer avant (ou pendant) le spectacle. Au menu, chili con carne, fromage, bière. Pas de la grande gastronomie mais un côté convivial incontestable, avec vue panoramique sur la campagne lozérienne.

La nuit a commencé avec Jean CHARTRON. Ce grand bonhomme, d'un abord simple, nous a tout de suite étonné par sa manière de jouer; Il est gaucher mais joue avec des cordes montées en droitier. Bien que seul, avec sa guitare acoustique, il installe une ambiance à la fois intimiste par la simplicité de sa musique, et explosive par l'énergie avec laquelle il joue. Il se sert allègrement de sa guitare pour ajouter des percussions. La voix est chaude, grave, un peu rauque, trés agréable à écouter et en concordance avec son jeu. Un jeu dynamique (une corde cassée l'a contraint à utiliser uniquement sa deuxième guitare) qui a su conquérir le public. Mélant chansons en anglais et chansons en français, standard de blues et compositions personnelles, les textes sont profonds et poétiques. Les arrangements (notamment sur
Key To The Highway et
Baby Please Don't Go) ont une personnalité affirmée. Ce musicien nous a donné un moment magique dans un cadre exceptionnel.

Les Marvellous Pig Noise se sont ensuite installés et ont démarré sur les chapeaux de roue. Leur musique, du blues revisité à la sauce New Orleans, arrosé de beaucoup d'humour et de bonne humeur, a fait bougé tout le monde. Ce groupe est fabuleux, les musiciens sont excellents et savent (presque) tout faire. Pierre CISTERNE, avec sa voix de ténor léger (c'est lui qui le dit) chante vraiment trés bien, mais je l'ai trouvé aussi trés bon à l'harmonica. J'ai beaucoup aimé son jeu au dobro et à la guitare, cette guitare qui a un son superbe. Quelque chose de vieux, de traditionnel, et de clair en même temps, même amplifiée elle sonne super bien. L'autre guitariste, Jérome DUSFOUR, à la guitare acoustique et au banjo m'a moins impressionné, le son était plus dur et je l'ai trouvé surtout bon accompagnateur.
La présence de David MELELLI à la bassine apporte un côté humoristique au groupe mais un son de basse aussi trés particulier. Les claviers étaient tenus par Christian BENARD qui, de temps en temps, est venu au devant de la scène pour jouer à merveille son rôle de chanteur-prédicateur, avec une belle et grosse voix de baryton. Je finirai sur un autre personnage haut en couleurs...musicales: Jean-Brice VIETRI qui est un véritable homme-orchestre. Il tient une rythmique de folie avec sa washboard, une petite batterie, un tambourin, toutes sortes de percussions, des cymbales, et j'en passe. Celà apporte un côté joyeux et spectaculaire qui a fait de ce groupe un grand moment de cette nuit du blues.
Les morceaux, tirés de leur CD ainsi que du prochain étaient bien interprêtés, assortis de quelques titres de Révérend Gary DAVIS et de Bukka WHITE entre autres, avec des arrangements là aussi (forcément) trés particuliers.

A cette heure avancée de la nuit, le public s'est clairsemé. Certains se réchauffaient prés du feu qui crépitait dans l'immense cheminée, prés du bar.
Entre chacun des sets, et donc en attendant la mise en place de Jeff Toto Blues, dans un coin de la première salle, Matthieu (j'sais pas son nom, je crois qu'il est de Toulouse) jouait du blues sur une Strat, tout seul avec un simple ampli, et ça le faisait. Son jeu est impeccable, et voir un musicien jouer dans le public, si proche, c'était exceptionnel. Un seul bémol, sa voix, que je n'ai pas aimé du tout. J'aimerais le revoir jouer dans un groupe, ça doit être trés bon.
Ceux qui avaient résisté au sommeil ont accueilli Jeff Toto Blues pour le dernier set. Aprés les Marvellous Pig Noise, réchauffer le public allait être une chose ardue. Mais Jeff, c'est une joie de jouer, de vivre son blues, qui est trés communicative et le public s'est bien pris au jeu. En débutant par
Hymne Au Blues, c'est ensuite la soul qui a été abordée, pour mieux revenir au blues aprés un petit passage par le reggae.
Autant dire que Jeff Toto a plus d'une corde a son arc et que son répertoire est finalement bien fourni et hétéroclite. Les morceaux ont été quasiment tous des compositions personnelles, en français. Le groupe était "allégé" puisque Stéphane ESPINASSE qui est habituellement à l'harmonica, n'était pas là pour accompagné Eric Orsoni (qui a tourné pendant un temps avec Bernard LAVILLIERS) à la basse et Didier HANOT à la batterie. Jeff (Jean-François THOMAS) a donc joué de l'harmonica, en plus de sa Télécaster.
Sa voix rauque m'a rappellé celle de Patrick VERBEKE et sert trés bien ses chansons blues. Les textes en français parlent de la vie quotidienne et sont plaisant à écouter.
Le spectacle s'est terminé vers 2h30. Ce fut une nuit de blues. Pour une première, j'estime que cette soirée a été trés bien menée, et la qualité de la musique était d'un haut niveau. Le cadre est exceptionnel pour ce genre de représentation et y donne une identité toute particulière. Il faut saluer les efforts des organisateurs (L'association des familles de Langogne et Jean-François 'Jeff Toto' THOMAS) qui avaient visiblement mis beaucoup de cœur à lancer cette nuit du blues. Jean-François est une véritable personnalité de sa région et a été trés accueillant, trés sympathique. Nul doute que la deuxième nuit du blues mérite d'exister, suivie par de nombreuses autres.
Article paru dans
La Gazette de Greenwood No 34.
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© Philippe ESPEIL
- Dernière modification: Samedi 27 Octobre 2001