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Festival


"Jazz à Vienne 2002"



[Date de rédaction: Dimanche 11 Août 2002]



Tout d'abord, le programme Blues (In et Off) de cette édition 2002:
29 juin au 6 juillet: Mouss à La Taverne Maître Kanter.
29 juin : Bencho au Bar de l'Hôtel de Ville.
01 juillet : Bencho au Bar du Temple.
01 juillet : Marco Triax au Tropical Café.
02 juillet : Shemekia Copeland au Thétre Antique de Vienne.
02 juillet : Jean-Jacques Milteau au Thétre Antique de Vienne.
02 juillet : Buddy Guy au Thétre Antique de Vienne.
02 juillet : Shemekia Copeland au Thétre municipal de Vienne.
02 juillet : SOS Blues au West Saloon.
03 juillet : Brutus au West Saloon.
03 juillet : Marco Triax au Bar de l'Hôtel de Ville.
05 juillet : Bencho au Bar de l'Hôtel de Ville.
08 juillet : Jeff Toto Blues au West Saloon.
09 juillet : Double Stone Washed au West Saloon.
09 juillet : Marco Triax au Bar de l'Hôtel de Ville.
10 juillet : SOS Blues au West Saloon.
11 juillet : Electric Lady Band au West Saloon.
11 juillet : Bencho au Bar de l'Hôtel de Ville.
12 juillet : Railroad Crossing au Tropical Café.


Pour débuter en bleu ce festival de jazz à Vienne, c’est un groupe de la région lyonnaise, Bencho, qui attira mon attention. Ce groupe est assez souvent annoncé dans les "lieux blues" de la région sans que j’ai encore eu l’occasion de les voir. Etiqueté blues-rock, dans les programmes, y compris ce soir-là où le Bar du Temple les recevait, je fus assez surpris par le répertoire joué. En effet, en guise de blues-rock, ce sont des chansons de Souchon, Jonasz, Brassens entre autres qui ont été reprises. Etait-ce une demande du Bar du Temple pour toucher un public éclectique ? Est-ce une mauvaise étiquette que traîne ce groupe ? En tout cas, c’était pas très blues tout ça !
Il me faudra donc les revoir pour constater de quel "blues-rock" ils sont vraiment capables.

Le temps fort (blues) de ce festival est la nuit du blues qui a eu lieu dans le Théâtre Antique.
Une affiche prestigieuse pour cette 22ème édition de Jazz à Vienne. Jugez-en plutôt: Shemekia Copeland, Jean-Jacques Milteau, Buddy Guy.
Tout d’abord Shemekia Copeland, fille de feu Johnny Copeland, grand guitariste et bluesman Texan. J'avais un préjugé négatif, je l'avoue, sur cette artiste qui ne m'avait pas convaincu lors de la sortie de son album "Turn The Heat Up" en 1998. C'est donc avec curiosité que j'allais assister à un de ses concerts. Je ne fus pas déçu.
Elle a fait preuve d'une énergie, d'un enthousiasme entraînant. Son blues se décline aussi en soul ou en rock (le guitariste Arthur Neilson jouait d'ailleurs très rock à mon goût) mais ce qui surpasse tout c'est le chant de Shemekia. Pétri de gospel, la voix est puissante, généreuse, et pleine d'émotion. Pour ma part, la chanson qu'elle a dédicacée à la mémoire de son père fut un grand moment.
Son set fut trop court, à son départ le public déchaîné en redemandait et l'a applaudie jusque dans les coulisses où un cameraman la suivait. Mais l'organisation du Festival décida de nous laisser sur notre faim, avec une possibilité de rattrapage au Cercle de Minuit, au théâtre municipal, où Shemekia terminait la soirée.
Dona Oxford était aux claviers, Eric King à la basse, et Barry Harrison à la batterie.

Notre Jean-Jacques Milteau national suivait et, accompagné du compère Manu Galvin, nous a donné un formidable spectacle. Pour avoir vu Jean-Jacques Milteau à trois reprises cette dernière année, et Manu quatre fois, ce concert fut mon préféré.
D'abord Jean-Jacques communique beaucoup. Avec les musiciens, ce qui aide à la cohésion de l'ensemble, mais surtout avec le public, ce qui en fait un personnage sympathique et attachant. Quelques vannes au pote Manu, quelques critiques habituelles sur l'actualité, on est dans leur univers et le courant passe.
On apprécie d'autant plus la musique avec un répertoire choisi pour l'occasion, c'est à dire accès à quatre-vingt pour cent sur le blues. La promotion de "Memphis" n'a même pas été prédominante et Jean-Jacques nous a donné un aperçu de la large palette de son talent, y compris au chant où il a fait d'énormes progrès.
Manu m'a beaucoup plu, notamment à l'électrique (pour l’acoustique, je pense que je ne pourrai définitivement pas supporter le son de sa Takamine).
Benoit Sourisse était à l’orgue, André Charlier à la batterie, Bobby Rangell au sax et à la flûte, Jean Gobinet à la trompette et Damien Verherve au trombone.

Puis est arrivée la vedette tant attendue, la légende vivante Buddy Guy. Certes, ce n'était pas la première fois que Buddy honorait le théâtre antique de sa présence, puisqu'il est venu à Vienne en 1998. Mais bon, un concert de Buddy Guy, ça ne se refuse pas.
Buddy a commencé son concert par Muddy Waters avec "Mojo Working" puis a enchaîné "Five Long Years". J'étais alors comblé car la soirée s'annonçait très blues alors que les rumeurs sur ses derniers concerts étaient plus que mitigées. Ainsi les vingt premières minutes furent un bonheur.
Ensuite, Buddy Guy est parti dans un jeu plutôt rock avec un son très agressif. Il arrivait qu'il ne finisse pas ses titres, rendus brouillons par un jeu trop bruyant, ou joués si faiblement qu'on ne les entendait qu’à peine.
L'organiste Tony Zamagni, s'il a de la présence, ne m'a pas convaincu et, incité par Buddy à prendre des solos, martelait inutilement son clavier. Là, la suite du concert s'annonçait plutôt mal et Buddy ne semblait pas motivé pour jouer.
J'ai cru un moment qu'il allait se reprendre avec "Feels Like Rain" ou "Damn Right I’ve Got The Blues" et même avec "Boom Boom" que son second guitariste, Frank Blinkal au bottleneck, a malheureusement massacré. Non, décidément la soirée ne semblait pas lui convenir et il se contentait de marmonner en faisant des grimaces. Pour le côté show, on a eu droit à prés d'une dizaine de minutes ou Buddy Guy s'est promené dans les gradins, chose qui plaît toujours énormément au public. C'aurait pu être encore plus plaisant s'il avait joué avec moins de rage sur sa guitare souvent désaccordée.
Une nouvelle fois, j’ai espéré qu’il s’assagisse lorsqu’il prit en main sa guitare acoustique en s’asseyant sur un tabouret de bar. Il joua "Old Man" et ce fut magnifique. Pour la suite, il essaya d’imiter Marvin Gaye, toujours à l’acoustique, et là de nouveau je ne comprenais plus. Puis il imita un shuffle à la SRV.
Terriblement déçu, je quittais alors le théâtre antique en entendant encore Buddy reprendre un SRV et, me semble-t-il (j’étais déjà loin) jouer "Sweet Home Chicago".
Jason Moynihan était au sax, Orlando Wright à la basse, et Jerry Porter à la batterie.

Etonnamment, cette nuit du blues restera dans ma mémoire pour l’excellente prestation de Jean-Jacques Milteau et l’agréable découverte de Shemekia Copeland. Quant à Buddy Guy, l’ayant déjà vu bien meilleur, je n’ai pas du tout compris son attitude.
Pour ce qui est des photos de cette nuit du blues, je n’en ai aucune à proposer et pour cause ; Cette année, même le théâtre municipal qui habituellement autorisait les photos, a décidé de refouler les photographes. Le blues ne mérite donc pas d’être médiatisé ?

Lilian des Double Stone Washed
Après une nuit du blues aussi étonnante, je ne pouvais qu’être conforté dans l’idée que le "off" du festival pouvait (pour le blues) se révéler tout aussi intéressant, voire plus. En particulier, le West Saloon proposait une programmation alléchante sur les deux semaines du festival, avec des groupes rock, blues-rock, country, blues. Ma première rencontre fut Double Stone Washed.
Venu du sud-ouest de la France, ce groupe existant depuis une dizaine d’année tourne beaucoup et affiche donc de nombreux concerts à son actif.
A l’honneur lors du premier set, des reprises de Willie Dixon, Muddy Waters, John Lee Hooker, ZZ Top, Dr Feelgood. Bref, des morceaux pleins de punch. Ce set fut une présentation complète de leur dernier album "Don’t Stop Washing", avec un son et une interprétation d’ailleurs assez proches du CD.
L’esprit blues-rock, tel Dr Feelgood qui est une de leur influence majeure et revendiquée, est très présent, surtout lors du deuxième set.
Mais revenons au premier, plus blues, qui fut l’occasion de voir le talent de ces musiciens. Lilian Descorps, l’harmoniciste-chanteur a une voix rauque, un peu sombre, qui va bien au blues et au blues-rock, à cette musique "pour les barbus et mal rasés de tout poil" comme il dit.
Aux guitares, les frères jumeaux, Franck Villafagne à l’électrique et Frédéric à la basse. Ils sont bons, efficaces, ils n’en mettent pas plein la vue mais bon, ce n’est pas forcément ce qu’on leur demande.
Le batteur, Julien Bigey, est jeune et est prometteur. Laurent Chêne, harmoniciste, n’a pas joué ce soir-là.
Double Stone Washed nous a donné un bon concert qui a bien plu à la clientèle plutôt branchée biker du West Saloon.

Marco Triax
Je devais terminer la soirée avec un autre groupe très présent dans la région lyonnaise, Marco Triax.
Lui aussi présenté comme groupe de blues-rock, je le retrouvais sur la place de l’Hôtel de Ville invité par le Bar de l’Hôtel de Ville. En guise de scène, il s’agissait d’un tapis étendu au centre de la place qui est habituellement un parking. On ne peut plus sommaire...
Condition difficile donc, devant un public clairsemé.
Marco est le guitariste-chanteur du trio, alors que Jean-Yves Brunel tient la basse et Patrice (Olmos ?) est à la batterie.
Marco est un bon quitariste, peut-être trop. C’est à dire qu’il a la technique, il joue vite, mais ne transpire pas de feeling. Très concentré sur son jeu, il semblait tout de même crispé, et à mon goût jouait de façon "aseptisée". Il n’empêche, avec un peu de temps, il prendra de la bouteille (je ne parle pas là d’alcoolisme ) et il y a de très bonnes choses à attendre de ce groupe.
Pour répertoire, tel "Everyday I Have The Blues", Marco choisit principalement des blues, mais pencherait parfois sans peine vers la country électrique ou le rock.

SOS Blues
Le 10 juillet, c’est SOS Blues qui assurait le concert au West Saloon. L’endroit est toujours aussi sympa et la petite scène accueillait cette fois une petite formation : deux personnes.
Le chant, la guitare, la batterie (caisse et percu) sont l’affaire de Fabrice Réno (qui pour certaines dates se produit seul). L'harmonica et parfois le chant, sont pour (Pierre ?).
SOS Blues
Cette recette fonctionne plutôt bien et nous a donné un résultat de qualité, dans la joie et la bonne humeur. Ces deux-là sont en effet là pour se faire plaisir, et faire plaisir à leur public par la même occasion. Ainsi, le show inclut quelques blagues, quelques gags (comme celui où Fabrice joue de l’harmonica alors que Pierre l’entourant de ses bras joue sur sa guitare. Je vous rassure, ça passe mieux en le voyant), et le but affiché est de passer un bon moment.
A deux, les interprétations de standards comme "On The Road Again", "The Sky Is Crying", "Rollin’ On The River" des Creedence, "Blues Suede Shoes" prennent une nouvelle couleur, peut-être pas toujours très blues, mais qu’il n’est que plus plaisant d’entendre revisitées. A signaler, une belle version de "Life By The Drop".
Après une plainte du voisinage qui a franchement refroidi l’assistance et les musiciens, des titres plus "softs" devaient être joués. "Message In A Bottle" ouvrit la porte à des titres plus orientés pop-rock FM. Dommage.
Pour passer un bon moment, SOS Blues est à ne pas rater, et pour ne pas bouder son plaisir, choisir une date en salle

Je devais terminer cette édition du festival avec les Railroad Crossing au Tropical Café. Ce groupe stéphanois n’est pas moins composé de musiciens de qualité : Les frères Védèche (Alain au chant et guitare, Gérard au dobro) et Mustapha "Mouss" Idir à la contrebasse.
A première vue, le problème qui s’offrait ce soir-là était du aux intempéries qui poussa le groupe à jouer dans le bar qui n’est pas du tout prévu pour cela (peu de place, beaucoup de résonance).
Autre inconvénient, la clientèle qui fait office de public était surtout présente pour la mousse du zinc et pas pour les musiciens.
Ainsi, difficile de trouver le répertoire qui va enfin attirer l’attention et encourager à jouer. Cependant, ils ne s’en sont pas trop mal sortis. Les chansons, surtout des standards de blues, étaient pour la plupart issues de leur album "Living On The First Floor". A celles-ci se sont rajoutés quelques titres plus populaires et des titres écrits par Mouss comme "Je Roule Cool".
Ce groupe a donc donné une prestation en deçà de leur véritable talent. Pour preuve, le concert à Salaise/Sanne à l’automne dernier se déroulait dans de bonnes conditions (une toute autre logistique) et était bien meilleur. Ne pas hésiter à aller les voir et les revoir.

Article paru dans La Gazette de Greenwood No 45.


© Philippe ESPEIL Dans les emails, remplacez _A_ par @ - Dernière modification: Mardi 20 Août 2002